Pour beaucoup, « coliving » - mot à la mode venu des Etats-Unis – est synonyme de colocation. Ou de vie en résidence étudiante. En fait, le coliving est un concept réellement différent, qui est en train d’émerger en France, porté par la mobilité de plus en plus grande des jeunes actifs "millenials". Face à cette nouvelle demande, les premiers acteurs du marché testent et innovent. Les investisseurs LMNP voient s’ouvrir de nouvelles perspectives… Etat des lieux.
Qu'est-ce que le coliving ?
Nouveau concept d’habitat partagé, le coliving se distingue de la colocation, en ce que chaque locataire (on parle de « coliver ») occupe un appartement et signe un bail. Le nouveau coliver est donc accepté dans une résidence compte tenu de ses revenus, mais aussi après une rencontre avec ses futurs voisins. Deuxième différence, le bail est un contrat innomé, c’est-à-dire non encore défini par le législateur. Chaque gestionnaire fixe donc ses règles. Mais le principe reste la flexibilité maximale; ainsi, le préavis de départ peut être très court, une semaine.
Une résidence en coliving peut être définie comme une grande colocation (dépassant les 5 colocataires habituellement autorisés pour aller jusqu'à plus de 150 personnes, dans certains cas) avec des services hôteliers. Concrètement, on peut avoir une résidence avec des logements d'une vingtaine de mètres carrés (chambres avec salle de bain) ou des appartements de 2-3 pièces d’habitation, donnant sur des espaces communs : cuisine, blanchisserie, mais aussi espaces conviviaux, salons, salle de projection, salle de sport…
Les logements sont meublés et connectés. Et les services sont para-hôteliers comme dans une résidence de services classique. Certains services peuvent être conçus pour un hobby ou une activité partagée.
La mobilité des jeunes actifs, un nouveau mode de vie...
La génération « millenials » est très mobile géographiquement, et entretient des rapports distants avec le logement. C'est ainsi que les 2/3 des "millenials" sont encore locataires, souvent pour des raisons de souplesse et de cadre de vie. De plus, pour les 3/4 d'entre eux, les salaires apparaissent augmenter moins vite que les prix de l'immobilier (source : CBRE).
Aujourd’hui, non seulement la durée des études s’allonge, mais la limite de l’entrée dans la vie professionnelle devient plus floue, avec des périodes études/travail/études. Et les jeunes actifs cherchent souvent à prolonger la convivialité de leur vie étudiante.
Lorsqu’ils arrivent dans une nouvelle ville pour un nouveau travail ou un changement d'établissement d'enseignement, les "millenials" doivent :
- trouver rapidement un logement, dans un contexte de pénurie,
- réduire le poids du loyer et des dépenses de logement en mutualisant toutes les charges (assurances, abonnement internet, eau, énergies…),
- recréer un réseau amical, étudiant et professionnel.
Si les deux premiers points relèvent du domaine utilitaire, de troisième, par contre, concerne le style et la qualité de vie. Les colivers veulent s’intégrer à une « tribu » définie selon leurs affinités. C'est pourquoi les services à thème sont si importants dans leur choix.
... partagé aussi par d'autres groupes
Si aujourd’hui 75% des colivers, en France, sont de jeunes actifs entre 23 et 31 ans, le coliving s’adresse aussi à d’autres profils, toujours en situation de transition :
- Couples en cours de séparation,
- Stagiaires, personnes en reconversion professionnelle,
- Travailleurs détachés,
- Free-lance et porteurs de projets…
- … voire « empty nesters », quarantenaires ou cinquantenaires dont les enfants viennent de quitter le foyer familial, et qui souhaitent combler la solitude créée par leur départ.
Ces profils très variés vont nourrir la demande de coliving, par contre, ils vont pousser à une plus grande différenciation des concepts de résidences.
Depuis 2017, un marché qui décolle doucement en France
L'offre en résidences de coliving reste très réduite. Si de nombreuses résidences étudiantes, ainsi que des appart-hôtels, sont étiquetés "coliving", il s'agit plus d'une nouvelle appellation marketing. S'il existe peu de véritables résidences de coliving, de nombreux projets sont annoncés.
L'emplacement est primordial : il faut être près des lieux qui intéressent les candidats à ce mode de vie. Les campus, les centres de coworking, les pépinières d'entreprises, les centres-villes et leurs équipements culturels, les noeuds de communications urbains peuvent assurer le succès d'une résidence. Le coliving est né dans les grands centres urbains, mais sa tendance est de gagner les villes moyennes dotées de grandes écoles (exemple de Fontainebleau, avec l'INSEAD et ses quatre résidences Colonies).
Des acteurs qui se différencient et innovent
Aujourd'hui, le marché du coliving se partage entre des acteurs de l'immobilier traditionnel, comme BNP Paribas Real Estate, et de nouveaux entrants, entièrement dédiés à ce concept, comme Sharies et Colonies.
Quarters, lui, s'intéresse à de grandes résidences d'au minimum 150 "clusters" - des appartements comportant 3, 4 ou 5 chambres d'au minimum 10 m2 - regroupés autour d'espaces communs, où les résidents peuvent se rencontrer et organiser des événements. Chaque immeuble est animé par un community manager. La grande taille de ces résidences permet de dégager une rentabilité confortable, alors même que les loyers sont inférieurs de 10% à ceux d'un studio classique.
Chez The Babel Community, l'argument principal est la qualité et la variété des espaces partagés : de grands salons, des cuisines spacieuses, une salle de sport, une salle de cinéma, un restaurant... ainsi qu'un espace de coworking qui accueille des personnes extérieures au coliving.
LP-Promotion, Kley et Global Exploitation déclinent le coliving dans leurs résidences étudiantes. Follo fait de même, se concentrant en régions, et dans des villes de moyenne importance, comme Saint Malo. Colonies s'adresse aux étudiants des grandes écoles et aux jeunes actifs, avec des locaux de caractère dans des bâtiments anciens.
Le succès - et même, le manque de disponibilité des logements - montre que ces offres ne couvrent qu'une très petite partie de la demande. Cela devrait amener de nombreux projets à voir le jour, et les résidences déjà existantes à se valoriser. Les investisseurs LMNP doivent garder un oeil sur cette formule, susceptible de transformer, directement ou indirectement, le paysage des résidences gérées dans les années à venir.